L’insuffisance rénale chronique est une maladie qui progresse silencieusement, sans signes visibles jusqu’à un stade avancé. Pourtant, 1 million de Marocains adultes sont concernés, soit 5,1 % de la population adulte, avec des conséquences lourdes pour la santé publique.
Pour sensibiliser le grand public, les résidents en néphrologie du CHU Ibn Rochd de Casablanca ont organisé une journée portes ouvertes à l’occasion de la Journée Mondiale du Rein. Cet événement a permis aux citoyens de bénéficier d’un dépistage gratuit et de conseils médicaux essentiels pour protéger leur santé rénale.
Une maladie fréquente, mais sous-estimée
Selon le Pr Mohamed Benghanem, Professeur de Néphrologie et Directeur de l’Hôpital Ibn Rochd, 300.000 personnes souffrent d’une insuffisance rénale avancée, et 4.000 Marocains entrent chaque année en dialyse. Cette situation alarmante est due à un diagnostic souvent trop tardif.
L’absence de symptômes aux premiers stades rend cette maladie difficile à détecter sans examen médical. C’est pourquoi elle est surnommée le “tueur silencieux”. Lorsqu’un patient commence à ressentir de la fatigue, un gonflement des jambes ou des troubles urinaires, les reins sont déjà gravement atteints.
Le dépistage annuel est donc essentiel, surtout pour les personnes à risque. Dès 40 ans, voire 30 ans pour certains profils, il est recommandé de mesurer sa tension artérielle et son taux de sucre dans le sang afin d’identifier précocement tout signe de dysfonctionnement rénal.
Les groupes à risque : qui doit se faire dépister en priorité ?
L’insuffisance rénale ne touche pas uniquement les personnes âgées. Au Maroc, quatre catégories de population sont particulièrement vulnérables :
- Les diabétiques, qui représentent un tiers des cas.
- Les hypertendus, responsables de 25 % des cas.
- Les personnes ayant des antécédents familiaux de maladies rénales.
- Les plus de 60 ans, dont la fonction rénale décline naturellement.
Pour ces groupes à risque, un suivi médical régulier permet de ralentir la progression de la maladie et d’éviter des complications graves.
Accès aux soins : un problème d’information plus que de moyens
Contrairement aux idées reçues, les soins pour l’insuffisance rénale sont accessibles au Maroc grâce à l’élargissement de la couverture médicale. Cependant, le véritable obstacle reste le manque de sensibilisation.
Trop de patients ignorent leur état de santé et ne réalisent pas de contrôles médicaux réguliers. Le Pr Benghanem insiste sur la responsabilité individuelle : chaque personne doit s’informer, prendre conscience des risques et consulter un médecin pour un dépistage préventif.
Le jeûne du Ramadan : une décision qui doit être encadrée médicalement
Le Pr Benghanem a également abordé la question du jeûne chez les patients insuffisants rénaux. D’un point de vue médical, il est fortement déconseillé, car la restriction hydrique aggrave l’état des reins et peut accélérer l’entrée en dialyse.
Toutefois, certains patients, lorsque la maladie est stabilisée et bien contrôlée, peuvent être autorisés à jeûner sous certaines conditions. La décision doit être prise par un médecin, en fonction de plusieurs critères :
- Le stade de la maladie et son évolution.
- La capacité du rein à supporter une absence prolongée d’hydratation.
- Les autres pathologies associées du patient.
“La responsabilité du patient est de suivre les recommandations de son médecin“, souligne le Pr Benghanem. Il ne s’agit pas d’un choix personnel, mais d’une décision médicale reposant sur des critères précis.
Préserver ses reins : les conseils du Dr Abdelhadi Cheggali
Au cours de cette journée, le Dr Abdelhadi Cheggali a partagé des recommandations pratiques pour aider les citoyens à protéger leur fonction rénale. Il a rappelé que de simples gestes peuvent faire une grande différence dans la prévention de l’insuffisance rénale.
Les bonnes habitudes à adopter :
- Boire suffisamment d’eau, sans excès.
- Limiter le sel, l’alcool et la cigarette, afin de contrôler la pression artérielle.
- Éviter l’automédication, car certains médicaments sont néfastes pour les reins.
- Adopter une alimentation équilibrée et privilégier les aliments naturels.
- Pratiquer une activité physique régulière pour maintenir un bon métabolisme.
Le Dr Cheggali a également insisté sur l’importance de consulter un professionnel de santé dès l’apparition de signes inhabituels, tels qu’une fatigue persistante, des gonflements ou une diminution du volume urinaire.