Kéfir : bienfaits, consommation et précautions à prendre

Pendant le mois de Ramadan, de plus en plus de Marocains s’intéressent au kéfir pour ses bienfaits sur la digestion et son apport énergétique. Cependant, il est important de l’introduire progressivement dans son alimentation afin d’éviter d’éventuels troubles digestifs, surtout lorsqu’il est consommé pour la première fois.

Ce breuvage fermenté, de plus en plus prisé au Maroc, est élaboré à partir de grains spécifiques de kéfir. Ces derniers sont constitués d’une microflore diversifiée et complexe, regroupant des ferments lactiques aux nombreuses propriétés. À ce jour, les recherches ont permis d’identifier plus d’une centaine de souches microbiennes grâce à des techniques avancées d’isolement sur des cultures spécifiques.

Lors d’études scientifiques, ces micro-organismes ont été placés dans un environnement lacté afin d’évaluer la possibilité de recréer artificiellement des grains de kéfir. Bien que cette tentative n’ait pas abouti, elle a révélé la formation d’un biofilm, confirmant la nécessité d’utiliser des grains préexistants pour obtenir cette boisson fermentée.

Le ferment de kéfir n’appartient ni au règne végétal ni au règne animal : il est uniquement composé de micro-organismes vivants. Lorsqu’ils sont immergés dans du lait, ces grains interagissent avec les sucres, les acides aminés et les minéraux présents, donnant ainsi naissance au kéfir de lait. Placés dans de l’eau avec des fruits secs ou frais, ils se nourrissent des sucres et des minéraux pour produire le kéfir d’eau, également connu sous le nom de kéfir de fruits.

Dans le cadre de cet article, enSante.ma a fait appel au Dr. Valérie Alighieri, médecin généraliste diplômée en nutrition, pour apporter un éclairage scientifique sur ce sujet.

enSante.ma : quels sont les bienfaits du kéfir pour la santé digestive et immunitaire ?

Dr. Valérie Alighieri : les aliments fermentés permettent de prendre soin de notre santé en améliorant notre microbiote intestinal. Celui-ci regroupe des milliards de microorganismes ayant un rôle essentiel dans la digestion, l’immunité, mais aussi sur notre santé mentale. Son déséquilibre, appelé dysbiose, peut entraîner l’apparition de diverses maladies comme l’obésité, les pathologies inflammatoires chroniques de l’intestin ou les troubles neuropsychiatriques. La consommation de probiotiques aide à rétablir l’équilibre du microbiote qui nous protège contre les germes pathogènes en les empêchant de nous coloniser et qui apprend aussi à notre système immunitaire à faire la différence entre germes « amis » et germes pathogènes. Le microbiote intestinal joue par ailleurs un rôle dans notre digestion en dégradant des aliments complexes tels que les fibres végétales (pectines, amidons des fruits, légumes et céréales) que notre organisme ne sait pas digérer seul. C’est pourquoi une alimentation riche en fibres et variée permet d’entretenir ce microbiote. Enfin, il favorise l’assimilation des nutriments et régule la digestion en influençant la vascularisation du tube digestif et son propre système immunitaire.

Les consommateurs de kéfir bénéficient des probiotiques qu’il contient qui aident à maintenir ou à rétablir le microbiote intestinal parfois malmené par diverses agressions (« malbouffe », antibiothérapies, maladies, etc.). Cependant, le kéfir n’est pas le seul aliment à apporter des probiotiques. On trouve des probiotiques naturels dans les aliments fermentés tels que les fromages au lait cru, les légumes fermentés (choucroute, soja, etc.), la levure de bière ou encore les yaourts, le skyr ou le vinaigre de cidre. Chacun contient des souches spécifiques de bactéries et/ou de levures probiotiques. À noter que pour qu’un produit soit considéré comme probiotique, il doit contenir au moins 1 million de microorganismes vivants par gramme. Cependant, tous les aliments contenant des probiotiques ne sont pas d’efficacité égale. Le nombre de microorganismes apportés peut varier de 1 million à plusieurs milliards par gramme d’aliment et il semble que la quantité de probiotiques qu’ils contiennent soit corrélée à leur efficacité. Cette quantité varie selon le mode de préparation, mais aussi d’autres facteurs.

Les yaourts sont bénéfiques mais bien moins riches en probiotiques que le kéfir. Ils contiennent tous les mêmes souches de probiotiques : Lactobacillus bulgaricus et Streptococcus thermophilus, au nombre d’environ 1 milliard de probiotiques pour 100 g. Le skyr est également limité en microorganismes mais apporte des souches différentes : les Bifidobacterium et les Lactobacillus acidophilus.

Le kéfir de lait apporte Lactobacillus, Lactococcus, Streptococcus et Lactobacillus kefiri, qui est unique au kéfir. Selon les cultures, 22 à 61 types de microorganismes sont retrouvés dans le kéfir de lait à raison de 1600 milliards de microorganismes pour 100 ml.

Syndrome de l’intestin irritable et intolérance au lactose, quel effet ?

Dr. Valérie Alighieri : la consommation de probiotiques et en particulier certaines souches semble soulager la douleur et améliorer la qualité de vie des personnes souffrant du syndrome de l’intestin irritable. Cependant, il faut bien noter que les études sont faites sur des produits probiotiques destinés à une population généralement saine. Chez les patients ayant une pathologie précise, l’utilisation de probiotiques devrait se limiter aux souches et aux indications dont l’efficacité a été prouvée et avec des produits aux normes de qualité microbiologiques adaptées à leurs besoins.

Des études sur des patients consommant des yaourts ont confirmé que certaines souches de probiotiques (Streptococcus thermophilus et Lactobacillus delbrueckii) améliorent la digestion du lactose et réduisent les symptômes liés à son intolérance. Les données concernant la consommation de kéfir par les personnes intolérantes au lactose sont difficiles à trouver, mais bien que le kéfir de lait contienne jusqu’à 80 % de moins de lactose que le lait, il convient de rester prudent sur sa consommation pour les personnes intolérantes. Il serait préférable de consommer le kéfir de fruits, qui ne contient pas de lactose.

Quelle est la meilleure façon pour consommer du kéfir ?

Dr. Valérie Alighieri : les effets liés à la consommation de kéfir dépendraient des souches utilisées pour sa production et des quantités de microorganismes que contient le produit. Par conséquent, la quantité à consommer au quotidien ne peut être donnée qu’à titre indicatif. Il suffirait de consommer 250 ml une à deux fois par jour à n’importe quel moment de la journée, mais au vu du rôle des probiotiques sur la digestion, il est préférable de les consommer au moment d’un repas contenant des aliments sources de fibres pour optimiser leur effet positif.

La consommation de kéfir devrait être progressive, en démarrant avec un verre par jour afin d’observer la tolérance au produit. Les probiotiques du kéfir restent présents plusieurs jours dans le tractus intestinal, il n’est donc pas nécessaire d’en consommer chaque jour.

Quel que soit le produit consommé, le mode de conservation du produit est essentiel à sa bonne stabilité. Les probiotiques étant des microorganismes qui peuvent se dégrader, il est essentiel de respecter les consignes de conservation indiquées par le fabricant.

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