Salma Tibou, créatrice de contenu suivie par plus d’un million et demi d’abonnés sur TikTok, est récemment décédée après une chirurgie bariatrique pratiquée dans une clinique en Turquie.
L’opération, une sleeve gastrectomie, visait à traiter son obésité. Mais derrière cette décision médicale se cache une réalité plus sombre : celle d’un harcèlement quotidien sur les réseaux sociaux, fait de moqueries, de critiques virulentes et d’humiliations publiques.
Sa disparition brutale a bouleversé ses abonnés, mais elle soulève aussi des questions de fond sur la violence en ligne et les pressions esthétiques qui pèsent sur les jeunes femmes très exposées.
Depuis plusieurs mois, Salma subissait un flot régulier de commentaires haineux liés à son physique. Malgré sa popularité, sa sincérité et ses messages souvent positifs, elle n’échappait pas aux attaques. Ce cyberharcèlement aurait contribué à précipiter sa décision de subir une opération lourde à l’étranger, dans un cadre où le suivi psychologique est parfois absent ou négligé.
Vers une régulation des réseaux sociaux au Maroc
Le cas de Salma intervient alors que le Maroc réfléchit à un encadrement plus strict des plateformes numériques. Inspiré par les législations européennes et asiatiques, le projet vise à renforcer les outils de signalement, à imposer des obligations de retrait de contenus haineux, et à responsabiliser les opérateurs numériques face aux dérives observées en ligne.
Un chantier d’autant plus urgent que les violences numériques prennent de l’ampleur, en particulier chez les femmes et les jeunes.
Des chiffres qui inquiètent
Les données disponibles montrent que le cyberharcèlement est loin d’être marginal. Le Haut-Commissariat au Plan (HCP) estime à 1,5 million le nombre de Marocaines victimes de cyberviolence, soit 14 % des femmes âgées de 15 à 49 ans. Chez les adolescentes de 15 à 19 ans, le taux grimpe à 29 %. Selon une étude du CMRPI, 30 % des enfants et adolescents ont déjà été confrontés à une forme de violence en ligne. De plus, un rapport publié en janvier 2025, près d’un tiers des jeunes Marocains disent avoir été harcelés sur les réseaux.
Ces violences, le plus souvent anonymes, laissent des traces profondes. Peu de victimes osent en parler, encore moins porter plainte. Et la majorité ne bénéficie d’aucune aide psychologique.
Une alerte pour la société
Le décès de Salma Tibou ne se résume pas à une tragédie individuelle. Il met en lumière un vide : juridique, médical, mais aussi humain. Ce drame appelle à repenser notre rapport aux réseaux sociaux, à l’image, et à la santé mentale. Il pose une question collective : que faisons-nous, en tant que société, pour protéger nos jeunes contre la violence numérique et les dérives esthétiques imposées par les standards en ligne ? Ce qui est arrivé à Salma peut arriver à d’autres. Et si rien ne change, il arrivera encore.